Dans cet article de Marianne (n°1231), Benoît Duteurtre fait remarquer que nombre de politiciens utilisent l’expression « sens de l’histoire » pour justifier leurs décisions. Il montre à juste titre que certaines décisions historiques s’appuyant sur cette expression ont parfois été terriblement néfastes voire même sanglantes.
Malheureusement, le journaliste s’embourbe à son tour quand il pense qu’il importe de lutter contre la pollution (le sens de l’histoire) mais dénonce l’implantation d’éoliennes, recommande l’utilisation de voitures moins polluantes ou privilégie la recherche nucléaire (et le nucléaire existant) en vue de produire une électricité climato-vertueuse !
Sans doute Benoît Duteurtre est-il mal informé ! Dommage pour un journaliste dont l’une des missions est de bien informer en connaissance de cause. Mais il est vrai que la lutte contre la pollution est un domaine très complexe qui demande un effort d’analyse important.
Je me propose donc d’aider Benoît à mieux comprendre les enjeux de la lutte contre la pollution.
D’abord il faut bien comprendre et admettre que la source principale de pollution provient de la suractivité humaine ; du coup il importe de se demander si toutes nos activités sont bien nécessaires et de diminuer voire même arrêter celles qui le sont moins ainsi que celles qui sont le plus polluantes. De façon générale cette réflexion nous mène à la sobriété ; sobriété énergétique et sobriété dans nos achats de produits ou services en général.
On peut en déduire facilement qu’il est néfaste de vouloir faire rouler autant de voitures individuelles qu’actuellement fussent-elles réellement moins polluantes. Et pour éviter les engorgements, les bouchons, on ne peut construire toujours plus de voies de circulation, une source de pollution et un gâchis d’espace agricole, une ressource vitale.
Pire encore, on sait que la réalisation d’une voiture électrique, censée être moins polluante, a entraîné pour sa fabrication l’équivalent en pollution d’une voiture à moteur thermique qui aurait roulé 40.000 kms !
Pas besoin d’avoir fait « maths sup » pour comprendre que le maintien de la voiture individuelle pour tous est une aberration écologique.
La consommation d’énergie ne pourra pas devenir nulle même si nous devenons tous sobres. Il faudra donc toujours en produire suffisamment pour nos besoins et de manière la moins polluante possible mais aussi sans prélever dans les ressources fossiles ou fissiles terrestres qui sont limitées.
C’est pourquoi nous n’avons d’autre choix que d’utiliser les énergies renouvelables, c’est à dire toutes celles qui résultent directement ou indirectement du réacteur solaire situé à 150 millions de kms de notre planète.
Ces énergies renouvelables sont l’ensoleillement qui nous permet de récupérer chaleur et électricité, le vent, les courants marins, les courants des rivières et fleuves dont les barrages hydroélectriques, etc …
Nous voyons déjà des toitures et même des champs de panneaux solaires thermiques et/ou photovoltaïques, des éoliennes aussi.
Dire que ces éoliennes sont hideuses est surprenant ! Les biens plus nombreux pylônes électriques à haute ou très haute tension ne sont ils pas plus laids encore ? Et les énormes installations nucléaires en béton et ferraille ne sont telles pas si affreuses que personne ne veut habiter à proche distance ?
M’enfin poser le problème du choix d’un mode de production sous le seul angle esthétique n’est il pas gamin ?
Quand à l’électricité (voire la chaleur, actuellement gaspillée) produite par les 54 réacteurs nucléaires français, elle est loin d’être climato-vertueuse ! Quand on habite en ville, on ne voit ni la centrale, ni les mines d’extraction d’uranium, ni les transports de matières dangereuses … On se voile la face, on fait l’autruche …
Car la seule extraction de l’uranium (en très faible quantité par tonne de terres extraites) est extrêmement polluante tant pour le personnel travaillant dans ces mines que pour le voisinage !
Il faut aller voir ce qui reste d’une ancienne mine d’extraction canadienne, aller voir au Niger, au Kazakhstan, en Australie, en Russie, … Et réaliser les énormes dégâts faits à l’environnement, à notre planète commune donc.
Nous inciter à accepter le sens de l’histoire nucléaire sans discuter est mortifère. Certes l’électro-nucléaire produit très peu de CO2 mais ce n’est pas la solution contre le réchauffement climatique car il n’y a pas assez d’uranium facilement disponible sur Terre pour alimenter tous les réacteurs nucléaires nécessaires pour remplacer les autres sources d’énergie. Au niveau mondial, la production d’électricité nucléaire est au plus de 11 % ! Seule la France produit 75 % de son électricité par le nucléaire mais cela ne représente que 16 % de toute l’énergie consommée par le pays. Par ailleurs le réchauffement climatique inéluctable compte tenu de son effet à long terme, menace les sources de refroidissement des réacteurs nucléaires par l’asséchement des fleuves d’une part et par les risques d’inondation marine et les intempéries plus violentes.
La sécurité des installations nucléaires est sans doute menacée à moyen terme.
J’ai pas fait « math sup », je ne suis pas un ingénieur ingénieux (souvent sans éthique) ; je suis un simple citoyen capable de m’informer et de raisonner. J’aimerais que les journalistes qui publient dans les journaux soient tout aussi capables de ce bon sens trop souvent frelaté ou dénigré.
J’espère aussi que Benoît Duteurtre lira attentivement ma réaction et les arguments développés afin d’éviter de faire circuler à l'avenir, des idées erronées voire mensongères.
Edité le:16/10/2020