La formation continue en France est un grave échec

Je viens encore d’être démarché par téléphone par une personne qui, mandatée par une entreprise privée, me rappelle que j’ai des droits à formation !
Ces appels téléphoniques trop nombreux m’insupportent !
Et ils me rappellent malheureusement le grand échec de la formation continue dans mon pays.

La formation professionnelle continue est un droit qui existe officiellement depuis la loi Delors du 16 juillet 1971. Ce droit était initialement prévu pour permettre à tout salarié de bénéficier d’une formation professionnelle. Il était basé sur une négociation des partenaires sociaux et la signature d’un Accord National Interprofessionnel (ANI).
Le salarié disposait ainsi d’une possibilité intéressante d’enrichir ses connaissances et même de revoir sérieusement son orientation.
D’abord, cette possibilité a été dévoyée par nombre d’entreprises qui l’ont utilisée pour améliorer les connaissances de leur personnel dans leur seul intérêt.
Bien des employés incapables d’imposer leurs droits à formation auprès de l’employeur devaient alors prendre des cours du soir et surcharger leurs journées. Néanmoins les fongecifs (voir historique ci-dessous) ont permis à beaucoup de se former et préparer une conversion sur le temps de travail.

2009 puis 2018 sont des dates qui marquent l’évolution mercantile de la formation. Le DIF est remplacé par le CPF et le droit à la formation se monétise !
Par exemple la journée de formation due au salarié chaque année est remplacée par un montant annuel de 500 euros. Du coup nombre d’entreprises privées se sont saisies de cette opportunité mais rien ne prouve leur sérieux et leur souci d’être réellement au service de la personne voulant se former. L’État a créé une certification de qualité de ces entreprises mais aussi renforcé la centralisation administrative et sa lourdeur.

Au final, si je suis trop souvent démarché par une entreprise, ce n’est pas grave pour moi qui suis retraité depuis 2007 !
Mais je m’inquiète pour le jeune salarié d’aujourd’hui : trouve-t-il son compte dans le CPF ?

Historique de la formation continue
(source :https://cpformation.com/histoire-de-la-formation-professionnelle/#8211_2020)
Voir aussi https://cpformation.com

1939 la formation continue voit le jour (dispositif juridique)
1959 Loi Debré : évolution d’une conception individuelle à une approche étatique
1966 Loi du 30/12 : L’État et lui seul intervient dans la formation
1970 ANI signé : principe de formation professionnelle prise sur le temps de travail ; naissance du congé individuel à la formation ou CIF
1971 Loi Delors 16/07 Instauration du droit à la formation.
1981 Un ministère de la formation est créé
1982 Contribution des entreprises à la formation (0,1 % de la masse salariale) ; quelques entreprises en sont encore dispensées.
1983 les fonds de gestion du CIF sont créés (FONGECIF)
1984 Obligation de négociation sur la formation professionnelle. Les Comités d’Entreprises sont mobilisés (2 réunions annuelles sur la formation)
1990 Droit à la qualification des entreprises de formation. Droit du consommateur à la formation
1991 Obligation de financement pour toutes entreprises. Création du congé bilan compétence. CIF ouvert sous conditions pour les fins de CDD
1993 Création des organismes paritaires agréés (OPCA)
2000 Obligation pour l’employeur de donner la possibilité de se former à ses employés mais protection des employés en cas de refus.
2002 Création du congé de validation des expériences (VAE)
2004 ANI donne droit à la formation sur la durée de vie professionnelle. Confortation des FONGECIF. Le droit individuel à la formation (DIF) est créé. Les entreprises contribuent pour 0,2 % de la masse salariale.
2009 07/01 et 05/10 Deux accords ANI signés.

Cette date marque le début d’un grand virage de la formation continue !

Loi 2009-1437 Création du fonds paritaire de sécurisation des parcours pro.
Formation hors temps de travail (FHTT). Passeport orientation/formation. Portabilité du DIF.
2013 Accord ANI pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et sécurisation de l’emploi. Création du CPF. Eligibilité du CIF-CDD aux moins de 30 ans.
2014 05/03 Simplification des règles pour les entreprises en compétition. Formation des salariés ciblées sur les compétences et réalités économiques ! Le conseil en évolution pro (CEP) est créé.
2015 Le DIF est remplacé par le CPF. Le CEP, pris en charge par l’État mais privé, est gratuit. Le CPF est ouvert dès l’âge de 16 ans voire 15 ans si contrat d’apprentissage.
2016 Entretien pro obligatoire. Contribution de 1 % des entreprises au OPCA, alimentation des CPF.
2018 Loi 05/09 Le gouvernement Macron remplace le DIF (en nombre d’heures de formation) par le compte individuel de formation (CPF) sous forme monétaire. De nombreux organismes privés se ruent sur cette opportunité ! Régulation étatique des formations pro. par France Compétences. Certification qualité des organismes privés de formation.
2019 01/01 CPF en euros avec un coup de rabot important !
Avant : 24h/an aux salariés, 48h/an pour les moins qualifiés
Après : 500 euros/an, 800 euros/an
Le plan de formation devient plan de développement des compétences.
2020 Le financement des CPF est confié à la caisse des dépots. Le financement de l’apprentissage relève des branches pro. Ou de France Compétences. Le CEP est gratuit pour tout salarié. Création du CPF de transition (projet de reconversion)
2021 Fin transfert solde Dif vers CPF. L’État encourage les formations au numérique (parce que c’est à la mode de l’hypercentralisation )!

Edité le:23/08/2022