Réflexions sur les retraites
La retraite par répartition a été inventée au lendemain de la guerre de 39-45.
A cette époque tout le monde était au boulot; rares étaient les retraités. Nombreuses étaient les naissances (baby boom).
Donc il était facile pour les actifs de payer les retraites des passifs d'autant plus que la couverture des retraites n'était pas totale. L'âge de départ à la retraite est fixé à 65 ans.
Il y avait presque autant de caisses de retraites que de types de professions.
Un peu plus tard (1960-1970?) on a voulu étendre la couverture des retraites à tous. Et il a fallu créer des compensations entre caisses de retraites afin de réaliser correctement cette couverture totale. Les êtres nés du baby boom arrivent sur le marché du travail. Il y a encore quasi plein emploi.
Un peu plus tard (1980-2000) les effets de la crise du pétrole, les effets du néolibéralisme et de la mondialisation commencent à se faire sentir durement. Le chômage n'est plus inférieur à 5% et voisine souvent les 10%. Les jeunes ont du mal à trouver leur premier emploi, les actifs embauchés s'accrochent à leurs employeurs et à leurs acquis, les seniors connaissent trop souvent le chômage et ce, bien avant l'âge de départ à la retraite.
Les gouvernements mettent en place des mesures d'incitation d'embauche des jeunes mais au détriment des cotisations sociales. L'un d'eux rabaisse l'âge de départ à la retraite pour améliorer le sort des seniors.
Le système de retraite par répartition commence à connaître des problèmes; on augmente progressivement le taux des cotisations. Et malgré cela l'équilibre reste précaire.
Un peu plus tard (2005-2010) les papy boomers prennent leur retraite; ils le font souvent très tôt à 60 ans ou moins car contraints par le système. Pourtant, le taux de chômage ne s'améliore pas, le nombre d'actifs au boulot continue à baisser.
Cette fois le système de retraite par répartition connait de graves problèmes.
Un gouvernement décide d'allonger progressivement le nombre de trimestres de cotisations.
En 2010, un gouvernement propose de relever l'âge de départ à la retraite à 62, 63, ... 65 ans ? Même si cette mesure a été votée, les caisses de retraite resteront dans le rouge.
En effet le nombre des retraités ne cesse de croitre plus rapidement que le nombre des actifs; ceci s'explique par la démographie d'une part, l'immigration insuffisante et mal maîtrisée, l'allongement de la durée de vie.
D'ici 2030 environ, il y aura 1 actif pour 1 retraité ! Le système de retraite par répartition, tel qu'on le connait aujourd'hui semble condamné. Car tout se passerait comme si chaque actif devait assurer la survie d'un retraité sur ses revenus, ce qui semble trop lourd à supporter.
Et pourtant, si on considère qu'il faut stabiliser la population mondiale et donc la population européenne ou française, ce ratio de 1 actif pour 1 retraité est normal. De même que celui de 1 enfant pour 1 actif. En gros, la population stabilisée signifie 1/3 d'enfants à éduquer et former, 1/3 de personnes au travail et 1/3 de retraités.
En supposant que l'actif travaille durant 40 ans, que le retraité vive 20 ans, que le jeune étudie 20 ans, on voit que l'actif supporte à parts égales son propre enfant et son parent. Pendant ses 40 années d'activité, 1/3 de ses revenus cumulés (*) lui reviennent en propre, 1/3 est utilisé pour l'enseignement et les aides à son enfant, 1/3 sert à faire survivre son parent. (*) Par revenu cumulé en entend revenu brut + toutes cotisations.
Il faut donc repenser le système de répartition des retraites ainsi que bien d'autres systèmes tels que la couverture sociale maladie ou le devoir régalien de formation des jeunes sur cette réalité.
De même il faut intégrer le fait que les ressources de ce monde sont finies, avec comme conséquences majeures, la nécessité du recyclage et l'obligation d'éviter tout gaspillage.
Enfin, les pollutions générées par l'activité humaine doivent être supprimées si l'on souhaite la survie de notre espèce humaine.
Ces contraintes fortes sont une chance car elles signifient que nous avons un champ de travail très important; certes ce champ est très différent de ce que nous connaissons encore aujourd'hui mais, en volume, il est énorme. Nombre de nos équipements actuels deviendront inadaptés voire inutiles. Il faudra donc les récupérer et les transformer efficacement. On peut donc espérer, pour un futur proche, le plein emploi. A tel point qu'on est en droit de penser qu'il faudra remettre au travail des retraités et qu'il sera intelligent d'aller chercher les bonnes idées auprès des jeunes parce qu'ils s'adaptent bien mieux que les adultes au monde qui les entoure !
Ceci posé, le travail ne manquant pas, il faut bâtir le système de retraite nouveau sur la valeur travail d'une part mais aussi sur la valeur ressources terrestres d'autre part. En effet, la finitude des ressources terrestres implique que la valeur de celles-ci devrait s'accroître de par leur rareté. Et on peut craindre, à l'inverse de ce qui se passe aujourd'hui, que la valeur marchande de la matière d'un objet soit beaucoup plus importante que la valeur du travail fourni pour faire cet objet. Il faudra donc obligatoirement taxer plus fortement le bien ou la ressource que le travail.
On peut penser que les échanges de biens matériels seront beaucoup plus faibles qu'aujourd'hui et qu'en conséquence, la taxation sur la valeur d'un bien ne sera pas efficace. Le versement d'une pension ou d'un salaire sous forme monétaire présenterait alors, beaucoup moins d'intérêt que la fourniture d'un bien sur lequel, par son travail, on peut tirer des revenus de vie. Je pense, par exemple, au bout de terrain dans lequel un retraité en bonne santé pourra cultiver des légumes pour lui même ou même ses proches. De même, la mise à disposition par un retraité, d'une partie de son logement libéré pour des jeunes serait pertinent. Cela revient à dire qu'on s'achemine peut être vers une société de troc qui semble plus juste et plus équitable que la société monétaire actuelle.
Repenser le système des retraites d'aujourd'hui en vue d'assurer sa pérennité implique d'avoir en tête cette vision futuriste et de prendre des mesures compatibles avec l'évolution probable dans son ensemble. S'arrêter aux phénomènes démographiques mais ignorer les phénomènes de pénurie, de pollution, etc ... c'est se mettre des oeillères et inventer l'eau chaude !
Puisqu'il faut faire évoluer le système des retraites, comme bien d'autres systèmes d'ailleurs, confions cette réflexion essentielle à ceux qui sont les plus concernés, c'est à dire les jeunes actifs. Pour les encadrer dans ce projet vital pour eux, je pense que les mouvements écologistes sont les mieux placés.