Pourquoi la réforme des retraites n’est ni juste ni réaliste

Macron et son gouvernement veulent faire passer en force une loi sur les retraites même si la majorité de la population y est opposée. C’est donc là, un très grave déni de démocratie.
Mais c’est aussi une idée stupide et à courte vue. Macron et/ou ses conseils regardent par le petit bout de la lorgnette ; ils n’ont pas de vision assez large.
Le système de retraite par répartition français évite toute capitalisation puisque les cotisations perçues auprès de ceux qui travaillent sont immédiatement reversées aux retraités ; cela montre bien que travail et retraite sont fortement liés et qu’il est donc imbécile de focaliser sur la seule retraite. Sans doute de grands banquiers regrettent que notre système de retraite ne soit par capitalisation et sans doute devons nous nous inquiéter que les coups de boutoirs des réformes retraites n’aient d’autre objectif que de dégoutter les actifs au travail et les inciter à capitaliser !
En réalité, si le taux de chômage en France était plus bas, le système par répartition actuel serait nettement bénéficiaire. C’est donc bien l’organisation du travail qu’il faut réformer en priorité.

La retraite n’est qu’une phase terminale du travail. L’organisation générale du travail dans nos vies comprend la formation et/ou l’apprentissage, le travail et la retraite. Il faut donc réfléchir à l’organisation et à l’imbrication de ces trois composantes.

Formation et/ou apprentissage
Normalement l’école doit apporter à chaque élève les bases de tout enseignement et cet enseignement doit être adapté au monde réel ; en sortie d’un tronc commun qu’on peut situer au niveau de l’ancien BEPC (*1 voir argumentaire), chaque élève doit maîtriser la langue française, connaître et savoir parler au moins une langue étrangère, avoir un bon entendement, des bases solides en mathématiques, en sciences physiques et de la terre et un minimum de pratique professionnelle dans au moins un domaine.
Puis il peut alors se spécialiser dans le domaine technique et/ou intellectuel et/ou artistique de son choix. Et c’est encore l’Education Nationale qui enseigne ces formations ou ces apprentissages et non les entreprises privées (*2 voir argumentaire). Les futurs travailleurs sont ainsi armés et capables d’entendement et d’adaptation aux emplois qui leurs seront proposés, lesquels sont en constante évolution. D’autre part, la formation dite continue, doit être poursuivie tout au long d’une carrière.

Travail, activité
L’employeur ne doit pas exiger un CV en or, une formation/expérience spécifique à l’emploi qu’il propose. Il doit à priori faire confiance à la personne qu’il embauche sachant que le préavis lui permet de se séparer d’une personne qui ne convient pas. (*3 voir argumentaire).
A l’inverse, l’employé peut quitter l’entreprise au terme de ce préavis si les conditions de travail ne lui conviennent pas. Ces conditions de travail ne se limitent pas aux horaires, aux cadences, à l’environnement, etc … Elles s’élargissent à la notion d’intérêt général de ce travail. C’est cet ensemble qui doit être bien défini afin qu’employeur et employé soient solidaires.
En effet, le travail de tous est désormais soumis à l’exigence de survie de l’humanité face aux conséquences du réchauffement climatique et de la perte de biodiversité. De ce fait, tous les travaux qui aggravent directement ou indirectement le réchauffement climatique ou la perte de biodiversité ne sont pas souhaitables.
Certes il y a des travaux commodes, aisés et d’autres qui le sont beaucoup moins. Certes on ne peut pas abandonner brutalement tous les travaux néfastes à la survie de l’humanité. Néanmoins il faut tendre à ne faire en priorité que les travaux vraiment utiles à notre survie.
Pour tenir compte de la qualité d’un travail on peut définir pour chaque heure travaillée un facteur de dureté et un facteur environnemental (voir composante retraite).
Les conditions de travail élargies doivent intégrer cela afin que chacun employeur ou employé sache pertinemment l’intérêt ou non de son travail.
Cette disposition essentielle implique plus de travail non automatisé, plus manuel sans doute, plus varié aussi. Il est fort probable que le recours à davantage de main d’oeuvre et moins d’utilisation de machines en découle. On peut en déduire que le taux de chômage baissera fort, voire qu’il y ait manque de main d’oeuvre ! Du coup, le volume des cotisations pour la retraite devrait augmenter ; peut être même pourrait-on diminuer le taux de cotisation retraite ?

Retraite
Socialement, la rente de retraite est due à tous ceux qui ont travaillé un minimum de temps durant leur carrière professionnelle, leur temps de travailleur actif. Ce capital temps travaillé peut se mesurer selon plusieurs critères :
1) la durée de travail (heure, jour, mois, années)
2) la dureté du travail (de jour, de nuit, haché, continu, facile, pénible, très pénible, ...)
3) l’environnement de travail (calme, bruyant, polluant, …)
C’est donc une combinaison de ces critères qui détermine le capital travail donnant droit à une retraite complète. (*4)
L’âge minimal de départ à la retraite peut être relativement bas afin de permettre à chacun de prendre sa retraite même si son capital travail n’est pas complet. Cet âge pourrait être fixé à 60 ans.
Il faut donc définir une décote et une surcote du montant de la retraite en fonction du rapport entre le capital travail obtenu et le capital travail référence retraite. La personne qui le souhaite peut partir dès 60 ans avec une retraite sans doute partielle ou bien continuer à travailler jusqu’à ce que son capital travail référence soit atteint.
Plus une personne a cotisé durant sa vie active, plus elle percevra une rente retraite importante. Néanmoins, ce principe général doit être adapté au mieux. Un minimum vital de rente retraite et un maximum de rente retraite doivent être définis ; le minimum pour que le retraité ne soit pas en situation précaire ou de pauvreté, le maximum parce qu’il semble indécent de gonfler la dépense de rente retraite pour quelques privilégiés qui par ailleurs ont souvent déjà des biens qui leur rapportent.
Il semble judicieux d'aménager le départ en retraite en sifflet; quelques années avant le départ, le futur retraité travaille davantage en temps partiel ou encore participe activement à la formation de son ou ses successeurs. Cette formation, qui ne s'apparente pas à un apprentissage a pour but de bien transmettre tous les acquis, toute l'expérience du sénior dans l'intérêt primordial de l'entreprise.
De plus elle permet au futur retraité de se préparer, de s'adapter à une moindre activité.

Les trois composantes, Formation/apprentissage, Activité/Travail, Retraite sont interdépendantes et imbriquées ; la partie Activité est essentielle et rien ne peut être construit durablement sur la partie Retraite sans ce préalable particulièrement vital.
C’est pourquoi il faut redéfinir la composante Travail le plus finement possible avant tout et en adéquation avec les enjeux climatiques et de biodiversité de notre temps. C’est d’ailleurs, en connaissance précise de ce travail qu’on peut élaborer au mieux la composante Formation/apprentissage.


Renvois
*1 Le niveau BEPC correspondant à l’âge moyen de 15/16 ans semble préférable au niveau Bac de 17/18 ans car mieux vaut un tronc commun plus court acceptable pour tous qu’un tronc commun plus long qui laisse de coté nombre d’élèves et plombe l’ambiance des classes.

*2 Les entreprises forment les employés dans leur propre intérêt et donc ne cherchent pas l’épanouissement manuel ou intellectuel de l’apprenti. Souvent même elles mettent celui-ci sur le tas, au boulot en négligeant sa formation. C’est pourquoi il est indispensable que l’Education Nationale soit à la base des formations professionnelles ou pratiques.

*3 Trop souvent, l’entreprise recherche la perle rare, la personne déjà formatée d’avance au job proposé. Ce faisant, l’entreprise se prive de la découverte d’un talent autre qui pourrait lui apporter des choses nouvelles très utiles dans notre société qui change très vite. De plus, les nouveaux salariés ne peuvent pas avoir toutes les compétences requises puisque c’est la pratique du job qui va leur donner ces compétences. Du coup, chacun, employeur ou employé triche dans sa demande ou dans sa présentation. Il faut changer ce malentendu et accepter le risque du nouveau !

*4 Le capital travail est donc une fonction mathématique :
CT = f(durée,dureté,environnement)
Par exemple, si le travail est dur et se fait dans un environnement néfaste, le CT pourrait être égal à 2 fois la durée effective de travail ; ce qui permet donc d’obtenir plus vite le capital travail minimal qui donne droit à une retraite à taux plein.
En conditions « normales » le CT pourrait être égal à la durée travaillée.
En conditions « avantageuses » le CT pourrait être égal à la moitié de la durée travaillée.

Edité le:22/02/2023